...Un nom si bête finalement.
Souvent, j'y pense et je me dis que finalement, ils auraient dû trouver un autre nom à ce sport.
En même temps pourquoi pas "tennis"?
Pour d'autres, "football", "handball", formule 1" ou encore "basket-ball" ont la même résonance.
Cette résonance que même la raison, aussi forte soit elle, ne peut vous contraindre à la raison. A la raison toute bête des "je dois me lever tôt demain", "je me dois d'être là pour Pierre, Paul Jacques", "j'ai ma vaisselle à faire", "ils gagnent des millions et moi que dalle", "ce n'est qu'un sport et puis sans moi ils joueront quand même"...et patati et patata, bla bla ou bien oualali oualala comme on dit par chez moi.
Finalement, vous comme moi, passionnés de tennis, on finit toujours devant notre télévision et/ou notre écran d'ordinateur! Que ceux qui tomberaient par hasard sur nos conversations enflammées ne s'y trompent pas : nous avons des vies, sociales, professionnelles, amoureuses et nous trouvons tout de même un temps immense à consacrer à ce sport, que-dis je, à cette passion, à cette montée d'adrénaline. C'est ce qui m'étonnera toujours. Lorsque je m'interroge chaque jour sur le comment du pourquoi de qu'est-ce, je me dis "mais où trouves-tu le temps?". Au-delà de trouver du temps, la clef réside plutôt dans une autre interrogation: où trouves-tu l'envie ?
L'envie... L'envie, elle n'est pas innée. Plutôt acquise. Mon père est un ancien boxeur professionnel qui s'est échiné à m'inculquer la passion du sport. Malgré les différends qui nous séparent parfois, si je lui dois une chose et une seule, c'est l'amour du sport. Les quinzaines de Roland Garros, ces après-midis à prier pour que Pistol Pete gagne ENFIN ce satané tournoi. Raté. La jubilation de voir un ovni, Kuerten, gagner et nous transmettre sa joie de vivre, qu'on aime ou qu'on n'aime pas son jeu, le bonheur de voir Dédé triompher.
Mon enfance, c'était aussi préparer ma raquette et mes deux pauvres balles toute peluchées dès que Roland débutait et fatiguer ma mère en tapant contre le mur de son salon, rêver à un mariage avec Sergi Bruguera ou Alex Corretja (je n'ai pas tellement changé depuis sauf que Dmitry est blond :)), supporter Steffi et souhaiter qu'Arantxa arrête de la malmener et que Monica ne lui vole pas la vedette. C'était écouter mon père s'extasier devant Gabriela Sabatini, me dire que Nathalie Tauziat assurait quelque part, que Forget m'énervait déjà (il y a des choses impérissables...), que Michael Stich était un dieu incompris et que Big Mac allait me manquer.
Plus tard, ça a été de détester ce poison de Kafelnikov, pester contre l'admiration de mon père pour les soeurs Williams (malheureusement pour les pères, toute fascination a une fin, Serena a sonné le glas), vibrer avec Carlos Moya, exulter encore quand Guga a confirmé, désespérer pour mon Pete, apprécier Ferrero et...et...voir enfin Wimbledon, voir enfin l'US Open, voir tous ces tournois que je soupçonnais mais dont je ne mesurais pas l'intensité, la gravité, la force et encore après, découvrir ce bonhomme irascible avec ses boutons, sa queue de cheval et ses colliers que moi-même j'arborais : Roger Federer. Je n'aurais pas la mauvaise foi de vous dire qu'instantanément j'ai su. J'ai compris plus tard ce qu'il représenterait pour moi. J'ai assez dit ce que je pensais, sentais, ressentais, vibrais, respirais et vivais grâce à lui. Là n'est pas le propos. Enfin, pas tout à fait, car tout se rejoint.
Aimer le tennis, à mon sens, c'est d'abord, basiquement, parler à sa télévision ou son ordinateur (selon sa réticence ou son manque de moyen à s'abonner au câble) pour dire autre chose que des insultes (ce qu'on fait automatiquement lorsqu'on regarde les autres programmes, quels qu'ils soient) pour signifier son agacement, enchantement ou autre frustration.
C'est ne pas décrocher d'un match parce qu'on ne peut imaginer en rater l'issue et même pas un seul point, piquer un sprint vers les toilettes alors qu'on se retient depuis une demie heure, parce qu'au tennis, on n'a pas un quart d'heure : on a une minute trente.
C'est traiter de tous les noms ce mec (ou cette meuf) qui empêche notre chouchou de faire le break, insulter gentillement ce chouchou qui jusque là a été parfait mais qui au moment le plus important gâche LE point qu'il fallait remporter.
C'est se dire que parce que Roger, Rafael, Novak, Andy, David, Bertrand, Jacques, Yves, Georges ou je ne sais qui ne joue pas le prochain match, et bien on va errer ne serait-ce que deux petites heures. Mais quelles sont longues ces heures! Des heures à ruminer, à pardonner, chercher des excuses, relativiser, s'énerver, abandonner et se dire qu'il ou elle reviendra, forcément, ce n'est pas possible autrement. Sans lui (ou elle), quel goût donner à ce qui va venir ? Et si, et si, et si...
Souvent, tout simplement, c'est profiter d'un passing inattendu, d'un coup droit fulgurant, d'un revers court croisé qui scie les pattes de l'adversaire, un ace extérieur que finalement personne n'a vu venir, un smash hallucinant ou encore un lobe inespéré que tous croyaient en dehors des limites du court.
C'est aussi être incompris parce que parfois, on peut être complètement absorbé par ce sport sans le pratiquer. Ma première raquette, mes premiers retours, je les ai expérimentés à 7 ans. J'ai testé énormément de sports et le seul dont je me rappelle la sensation, c'est le tennis. Cette vibration qu'on ressent dans le bras alors même que la balle finalement va échouer dans le grillage... Ma raquette, je l'ai déposée à 15 ans et lorsque j'ai essayé de la reprendre il y a un an et que j'ai tenté de rattraper le service d'un mec de 18 ans qui mesurait 1m95 et que la balle m'a filé sous le nez et que tout le long de la partie je me suis rendu compte que je n'en touchais pas une, je me suis demandé à quoi rimait cet amour que je vouais au tennis.
Je vous le dis, peu importe qu'on ait ressenti cette vibration, peu importe qu'on ait déjà réussi un coup gagnant ou qu'on se vautre sur un retour ou encore, que vos chaussettes soient pourries par cette saleté de terre battue, l'important c'est ce qu'on ressent quand, dans nos petits canapés, on assiste à l'effort que ces géants fournissent, qu'ils soient 180eme ou numéro un mondial... en attendant d'être au bord du court pour entendre le chuintement d'un slice, le claquement d'un service gagnant, le chuchottement d'une amortie ou encore le hoquettement d'un coup droit...
Pour ceux qui ne pratiquent pas ou plus ce sport magnifique, un conseil : si jamais quelqu'un vous demande à quoi bon adorer quelque chose que l'on ne vit pas soi-même, demandez-leur à quoi bon écouter une mélodie si on ne sait pas en déchiffrer la partition ni en ressentir le toucher sur un clavier...
Souvent, j'y pense et je me dis que finalement, ils auraient dû trouver un autre nom à ce sport.
En même temps pourquoi pas "tennis"?
Pour d'autres, "football", "handball", formule 1" ou encore "basket-ball" ont la même résonance.
Cette résonance que même la raison, aussi forte soit elle, ne peut vous contraindre à la raison. A la raison toute bête des "je dois me lever tôt demain", "je me dois d'être là pour Pierre, Paul Jacques", "j'ai ma vaisselle à faire", "ils gagnent des millions et moi que dalle", "ce n'est qu'un sport et puis sans moi ils joueront quand même"...et patati et patata, bla bla ou bien oualali oualala comme on dit par chez moi.
Finalement, vous comme moi, passionnés de tennis, on finit toujours devant notre télévision et/ou notre écran d'ordinateur! Que ceux qui tomberaient par hasard sur nos conversations enflammées ne s'y trompent pas : nous avons des vies, sociales, professionnelles, amoureuses et nous trouvons tout de même un temps immense à consacrer à ce sport, que-dis je, à cette passion, à cette montée d'adrénaline. C'est ce qui m'étonnera toujours. Lorsque je m'interroge chaque jour sur le comment du pourquoi de qu'est-ce, je me dis "mais où trouves-tu le temps?". Au-delà de trouver du temps, la clef réside plutôt dans une autre interrogation: où trouves-tu l'envie ?
L'envie... L'envie, elle n'est pas innée. Plutôt acquise. Mon père est un ancien boxeur professionnel qui s'est échiné à m'inculquer la passion du sport. Malgré les différends qui nous séparent parfois, si je lui dois une chose et une seule, c'est l'amour du sport. Les quinzaines de Roland Garros, ces après-midis à prier pour que Pistol Pete gagne ENFIN ce satané tournoi. Raté. La jubilation de voir un ovni, Kuerten, gagner et nous transmettre sa joie de vivre, qu'on aime ou qu'on n'aime pas son jeu, le bonheur de voir Dédé triompher.
Mon enfance, c'était aussi préparer ma raquette et mes deux pauvres balles toute peluchées dès que Roland débutait et fatiguer ma mère en tapant contre le mur de son salon, rêver à un mariage avec Sergi Bruguera ou Alex Corretja (je n'ai pas tellement changé depuis sauf que Dmitry est blond :)), supporter Steffi et souhaiter qu'Arantxa arrête de la malmener et que Monica ne lui vole pas la vedette. C'était écouter mon père s'extasier devant Gabriela Sabatini, me dire que Nathalie Tauziat assurait quelque part, que Forget m'énervait déjà (il y a des choses impérissables...), que Michael Stich était un dieu incompris et que Big Mac allait me manquer.
Plus tard, ça a été de détester ce poison de Kafelnikov, pester contre l'admiration de mon père pour les soeurs Williams (malheureusement pour les pères, toute fascination a une fin, Serena a sonné le glas), vibrer avec Carlos Moya, exulter encore quand Guga a confirmé, désespérer pour mon Pete, apprécier Ferrero et...et...voir enfin Wimbledon, voir enfin l'US Open, voir tous ces tournois que je soupçonnais mais dont je ne mesurais pas l'intensité, la gravité, la force et encore après, découvrir ce bonhomme irascible avec ses boutons, sa queue de cheval et ses colliers que moi-même j'arborais : Roger Federer. Je n'aurais pas la mauvaise foi de vous dire qu'instantanément j'ai su. J'ai compris plus tard ce qu'il représenterait pour moi. J'ai assez dit ce que je pensais, sentais, ressentais, vibrais, respirais et vivais grâce à lui. Là n'est pas le propos. Enfin, pas tout à fait, car tout se rejoint.
Aimer le tennis, à mon sens, c'est d'abord, basiquement, parler à sa télévision ou son ordinateur (selon sa réticence ou son manque de moyen à s'abonner au câble) pour dire autre chose que des insultes (ce qu'on fait automatiquement lorsqu'on regarde les autres programmes, quels qu'ils soient) pour signifier son agacement, enchantement ou autre frustration.
C'est ne pas décrocher d'un match parce qu'on ne peut imaginer en rater l'issue et même pas un seul point, piquer un sprint vers les toilettes alors qu'on se retient depuis une demie heure, parce qu'au tennis, on n'a pas un quart d'heure : on a une minute trente.
C'est traiter de tous les noms ce mec (ou cette meuf) qui empêche notre chouchou de faire le break, insulter gentillement ce chouchou qui jusque là a été parfait mais qui au moment le plus important gâche LE point qu'il fallait remporter.
C'est se dire que parce que Roger, Rafael, Novak, Andy, David, Bertrand, Jacques, Yves, Georges ou je ne sais qui ne joue pas le prochain match, et bien on va errer ne serait-ce que deux petites heures. Mais quelles sont longues ces heures! Des heures à ruminer, à pardonner, chercher des excuses, relativiser, s'énerver, abandonner et se dire qu'il ou elle reviendra, forcément, ce n'est pas possible autrement. Sans lui (ou elle), quel goût donner à ce qui va venir ? Et si, et si, et si...
Souvent, tout simplement, c'est profiter d'un passing inattendu, d'un coup droit fulgurant, d'un revers court croisé qui scie les pattes de l'adversaire, un ace extérieur que finalement personne n'a vu venir, un smash hallucinant ou encore un lobe inespéré que tous croyaient en dehors des limites du court.
C'est aussi être incompris parce que parfois, on peut être complètement absorbé par ce sport sans le pratiquer. Ma première raquette, mes premiers retours, je les ai expérimentés à 7 ans. J'ai testé énormément de sports et le seul dont je me rappelle la sensation, c'est le tennis. Cette vibration qu'on ressent dans le bras alors même que la balle finalement va échouer dans le grillage... Ma raquette, je l'ai déposée à 15 ans et lorsque j'ai essayé de la reprendre il y a un an et que j'ai tenté de rattraper le service d'un mec de 18 ans qui mesurait 1m95 et que la balle m'a filé sous le nez et que tout le long de la partie je me suis rendu compte que je n'en touchais pas une, je me suis demandé à quoi rimait cet amour que je vouais au tennis.
Je vous le dis, peu importe qu'on ait ressenti cette vibration, peu importe qu'on ait déjà réussi un coup gagnant ou qu'on se vautre sur un retour ou encore, que vos chaussettes soient pourries par cette saleté de terre battue, l'important c'est ce qu'on ressent quand, dans nos petits canapés, on assiste à l'effort que ces géants fournissent, qu'ils soient 180eme ou numéro un mondial... en attendant d'être au bord du court pour entendre le chuintement d'un slice, le claquement d'un service gagnant, le chuchottement d'une amortie ou encore le hoquettement d'un coup droit...
Pour ceux qui ne pratiquent pas ou plus ce sport magnifique, un conseil : si jamais quelqu'un vous demande à quoi bon adorer quelque chose que l'on ne vit pas soi-même, demandez-leur à quoi bon écouter une mélodie si on ne sait pas en déchiffrer la partition ni en ressentir le toucher sur un clavier...
6 commentaires:
Superbe prose ! Que d'émotions et de souvenirs! :)
Ben t'as tout dit, et très bien par-dessus le marché.
Bel hommage auquel j'adhère à 200%.
Et on ne dira jamais assez la quantité insondable d'amour qu'il faut pour frotter à la main ses chaussettes ocre, en pourrissant tout le lavabo...
de norsup :
Touché.
Rien que pour lire, déjà, le voyage à "le tennniswhatelse" mérite un voyage.
Merci
C'est tellement vrai! Je me retrouve complètement là-dedans sauf que je fais de la compétition...
géniale Mrs Tursunov !! Quel plaisir de lire ce que tu écris; Tu sais si bien nous faire partager ton émotion et retranscrire ce qu'on ressent tous, quel que soit notre chouchou. Et oui, le tennis est une passion dévorante, faite de multiples petits souvenirs, détails que tu racontes si bien. J'ai quelques années (un euphémisme) de plus que toi et mes premiers émois tennistiques furent pour Borg. Comme les enfants avec Nadal aujourd'hui, je l'aimais parce qu'il gagnait Roland Garros tous les ans et qu'il avait un bandeau. Et puis j'ai découvert Big Mac et le tennis a pris une autre dimension. Ensuite il y eu le prince des courts Stefan Edberg et ses duels épiques avec Becker. ensuite pour des raisons diverses et variées j'ai abandonné le tennis. J'ai donc peu suivi la période Sampras/Agassi. J'ai comme toi adoré le voir gagner Roland comme j'ai aimé Kuerten.
Et puis, un jour, fin 2005, je suis tombée par hasard sur la finale du masters entre Federer et Nalbandian et là, j'ai été fascinée par ce joueur, Roger Federer. Puis en 2006, je l'ai vu gagner l'Open d'Australie et pleurer d'émotion devant Laver. Je n'avais jamais vu un grand sportif manifester une telle émotion. Et depuis, j'ai été définitivement conquise et je regrette amèrement d'avoir loupé la période 2003/2004 de son ascension au sommet, les premiers Wimbledons; les premiers US Open etc. C'est pour cela que je n'ai pas hâte qu'il arrête sa carrière. Tant que Roger jouera il restera mon chouchou de coeur, quel que soit l'adversaire et j'espère, que lui parti, d'autres grands champions viendront reprendre le flambeau. J'adore le tennis mais le tennis avec son joueur favoir cela prend une dimension supérieure même si parfois un peu masochiste.
Merci à toi pour ce beau texte.
Merci à vous pour vos commentaires.
Que cela vous parle me rassure: je ne suis pas folle :)
Je regrette souvent de ne pas être plus âgée et d'avoir raté le début de la médiatisation du tennis et la rivalité Borg/McEnroe mais bon,je ne suis pas si en retard que ça et peut-être que sur mes vieux jours je le regretterai moins grâce à l'éclosion d'une nouvelle légende!
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